Crédit photo : Olivier Baudoin
Aïda est un camps de réfugiés à côté de Bethléem. Ce camps existe depuis 1948.
Au début, c'était un village de tentes provisoires. En 1956, les tentes sont devenues des pièces en dur tout aussi provisoires (Toit : 10 cm d'épaisseur, mur 7 cm, pas de colonne de soutènement). Nous sommes en 2011, les pièces provisoires se sont agglutinées les unes aux autres, les unes sur les autres, les unes dans les autres.
Aïda est une aire circulaire architecturalement anarchique comme un jeu de cube en équilibre au pied du mur. Il est difficile de dire où commence et où fini une maison. C'est un cadastre surréaliste.
Nous y logeons pour 3 semaines.
Nous sommes collecteurs de matières, glaneurs d'instants, nous sommes des sacs vides qui ne demandent qu'à être emplit.
J'aime marcher dans le dédale des rues en pentes, peuplées de sourires, de regards, de chats, de jeux d'enfants et de vieux qui prennent le café dehors au soleil. J'aime le vent qui s'engouffre chargé de toutes sortes d'odeurs. J'aime rencontrer ces gens plein de dignité qui sont là provisoirement depuis 1948.
J'aime me perdre pour revenir toujours au même endroit..dans l'attente, à l'affût du détail qui fera voyager l'imaginaire que l'on retrouvera dans le spectacle final sous une forme ou une autre.
Le spectacle : Des tentes sur la place d'une ville européenne pendant 29 heures.
D'ailleurs au pied du mur, quelqu'un s'est installé sous une tente de fortune. C'est sur un petit terre-plein qui jouxte le théâtre du pape. Lui aussi a planté sa tente. Qui est-il ? Pourquoi installe t on une tente en marge d'un camps de réfugiés au pied du mur de séparation ? En Juillet, il n'était pas là. Fred et moi allons voir s'il y a quelqu'un. Personne à part un jeune chien. On « visite » l'endroit : une tente principale en parpaings et toile avec deux matelas au sol, une citerne d'eau, des toilettes dans une cahutte de tôle, une tente plus petite genre Ketchoua un peu plus loin, un étendoir, de quoi faire à manger. C'est du provisoire qui dure. Je ne sais pas ce qu'il attend ni pourquoi il est là.
Je demande à des soldats palestiniens qui il est : « from Jerusalem. » Rien d'autre à par ça ?
Olivier en parle à une personne du centre Alrowwad. Il lui répond : « Il boit, il prend des drogues, il est agressif, il est fou ».
Oui il faut être fou pour planter sa tente là. La vue n'est pas très belle.
Demain Emilien et moi y retournerons pour en savoir un peu plus.
Dans l'après-midi nous allons dans le centre de Bethléem revoir un ami qui tient une boutique de souvenir.
Nous passons par la vieille ville pour arriver à la Place de la Nativité.
Là il y a une tente plantée. Une tente bédouine, grande, avec un tissu noir devant au sol, il y a des matelas, de quoi offrir le thé. Un tissu flotte au vent, il parle d'unité de la Palestine. Cela me fait penser au prières sur les petits drapeaux dans le bouddhisme tibétain. Des paroles jetées au vent et dans l'attente qu'elles soient entendu par Bouddha et soient vraies un jour.
Il y a deux jeunes, devant la tente un garçon et une fille. Ils nous expliquent qu'il y a d'autre tentes dans plusieurs villes de Palestine : Naplouse, Ramallah, Gaza...
C'est un mouvement initié par les jeunes juste après la révolution de jasmin à Tunis.Ils nous disent que ce n'est pas facile. A Bethléem ils étaient d'abord quinze puis maintenant dix. Ils ont des problèmes avec la Police palestinienne. C'est bientôt Pâques, des milliers de touristes afflueront.
Probablement pas le moment de remettre en cause l'unité des morceaux de territoires qui reste de la Palestine.
Je les trouve beaux ces deux jeunes. Ils ont la beauté d'être convaincu et plein d'espoir. Pas de cet espoir exalté, non, un espoir solide et raisonné. De ceux qui dure longtemps.
Rendez-vous est pris un soir de passer les voir et de discuter plus longuement.
Nous allons voir notre ami. Et lui, à la cinquantaine : que pensent-il de cette résistance nouvelle. ?
Il dit qu'il ne sent pas concerné, il attend se sentir mieux en tant qu'humain, qu'il a besoin de se sentir vivre. Il n'est pas contre ce mouvement mais ce n'est pas pour lui. Nous l'embrassons , on doit se revoir un soir de la semaine il aura des blagues palestiniennes à nous raconter.
Nous allons ensuite manger dans un restaurant « The tent restaurant ». C'est un restaurant sous une tente. Cette fois, nous avons poussé un peu le hasard.
Nous parlons de choses et d'autres, de nous, des autres. Le serveur nous raconte des blagues palestiniennes, nous rions. On se connecte à facebook dans l'attente de réponses de nos contact. Ici et ailleurs en même temps.
Je ne peux m'empêcher de penser à toutes ces tentes, celles qui n'existent plus, celles qui représente le futur, celles d'habitations provisoires au pied du mur de Bethléem ou chez nous. Je pense à tous ces gens, dont je fais partie, qui attendent. Qui attendent autre chose, un autre présent, un autre avenir que ce qui nous est proposé. Qui attendent la possibilité de prendre une autre direction.
Quand en aura t on fini d'attendre ?
Pour l'instant, on attend le taxi.
PS : Nous avons rencontré l'homme de la tente. Il n'est pas si fou. Il s'appelle Foued Darwiche. Il nous a invité dans sa tente où il vit avec son fils avant il habitait Aïda Camp. Sur sa radio le chanteur AbdelHamid. La barrière de la langue nous a empêché d'aller plus loin.
Encore un mur à franchir.
Lisie Philip
2 commentaires:
très émouvant, merci de nous faire partager vos aventures
fat
je me souviens à PARIS avoir porté avec mes amis PALESTINIEN, leur drapeau, je suis de tout ceour avec eux, merci pour votre théâtre magnifique. Une femme de 69 ans domiciliée dans le LUBERON en FRANCE, je m'appelle françoise HILTGEN, opaternel riginaire de par mon grands père : CHARLES HILTGEN de l'ALSACE LORRAINE et de par ma grand-mère Marie LESPINE de MOURMELON LE GRAND (Marne - FRANCE
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